Compléter l’alimentation naturelle du hérisson
La « diminution de la disponibilité et de la répartition de la nourriture naturelle et de l’habitat associé » est en parti responsable du déclin du hérisson dans la plupart des pays européens, comme le confirme le rapport sur « la stratégie de conservation nationale des hérissons en Grande-Bretagne ». Compléter l’alimentation naturelle des hérissons est devenu une évidence pour le Royaume-Uni, pourtant cela ne fait, hélas, pas consensus dans notre pays.
Nous sommes conscients de la gravité de la situation pour la conservation du hérisson et c’est la raison pour laquelle nous avons fait le choix de nous rapprocher du docteur Sophie Lund Rasmussen pour collaborer sur ce dossier.
Le docteur Sophie Lund Rasmussen, spécialiste des hérissons depuis 2011, est favorable au nourrissage complémentaire des hérissons, tout en insistant sur l’intérêt de laisser pousser son jardin en libre évolution.
Le Collectif Renard Blaireau Nature et Vivant et le Dr Sophie Rasmussen vous invitent à apporter une complémentation alimentaire5 et une gamelle d’eau aux hérissons, en respectant ces quelques recommandations indispensables à la sécurité et au bien-être de tous :
- Disperser les sites d’alimentation afin d’éviter les interactions agressives.
- Garder les sites d’alimentation, les gamelles, et vos mains dans une hygiène parfaite afin d’éviter la propagation de maladies pouvant êtres mortelles pour les hérissons.
- Utiliser des croquettes de bonne qualité avec de la viande ou du poisson en ingrédient principal de préférence faible en protéines.
Le hérisson est en déclin dans la plupart des pays européens où sa population a diminué de 30 à 75 % depuis les années 2000 (The State of Britain’s Hedgehogs 2022).
Si les hérissons peuvent se nourrir d’une grande variété de proies (Wroot 1984 ; Yalden 1976), les insectes sont un de leurs mets de prédilection, or, les différentes études réalisées sur la biodiversité des insectes1 montrent que près de la moitié des espèces sont en déclin rapide, dont un tiers est menacé d’extinction.
Compléter l’alimentation naturelle des hérissons ne fait hélas pas consensus dans notre pays, et cela malgré qu’aucune étude scientifique sérieuse, ni stratégie de conservation n’aient été mises en place au plan national pour faire face à la disparition des hérissons. Les programmes de conservation les plus anciens pour cette espèce ont été effectués au Royaume-Uni notamment avec le BHPS et le People’s Trust for Endangered Species (PTES) qui ont lancé, en 2011 « Hedgehog Street », une initiative visant à promouvoir la conservation des hérissons en mobilisant les citoyens dans tout le pays. La campagne compte désormais plus de 133 500 protecteurs des hérissons. Cette campagne encourage les bienfaiteurs à signaler leur présence, ainsi qu’à confectionner des jardins accueillant pour les hérissons, en créant des ouvertures dans les clôtures, en leur fournissant des ressources complémentaires, tout en laissant des zones de jardin à l’état sauvages.2011, c’est aussi le moment où les populations de hérissons urbains se sont stabilisées au Royaume-Uni selon l’étude de Living with Mammals (PTES) et montrent aujourd’hui une remontée d’après l’étude Garden BirdWatch de BTO.
Des campagnes ont d’ailleurs été lancées dans plusieurs autres pays européens, notamment en 2023 au Danemark avec « Danmark spindsvin » du Dr Sophie Lund Rasmussen, qui organise des comptages de hérissons, et présente des méthodes pour créer des jardins adaptés aux hérissons, en Allemagne avec le « Deutschland sucht Igel & Maulwurf » (Deutschen Wildtier Stiftung et al.,2023), ainsi qu’en Suède avec le « Vi Räkner Sveriges Igelkottar » (WWF Suède et Nordens Ark, 2024).2
Le rapport sur la stratégie de conservation nationale des hérissons en Grande-Bretagne a permis d’identifier les six menaces qui pèsent sur les hérissons à traiter en priorité, avec en premier lieu, la « diminution de la disponibilité et de la répartition de la nourriture naturelle et de l’habitat associé », ce rapport montre aussi le degré de complexité et le risque d’inaction.3
Ce même rapport basé sur l’étude The State of Britain’s Hedgehogs 2022 et conçu avec plus de 30 acteurs parmi lesquels figurent des ONG de conservation de premier plan, des universitaires, des établissements d’enseignement, des spécialistes de la réhabilitation des hérissons et des organisations des secteurs des transports et de l’agriculture, suppose que complémenter l’alimentation naturelle du hérisson est bénéfique et qu’elle entraîne des concentrations locales plus élevées de hérissons dans certaines zones.3
Nous sommes conscients de la gravité de la situation pour la conservation du hérisson et c’est la raison pour laquelle nous avons fait le choix, afin d’éviter que la France reste dans l’inaction, ce qui pourrait aggraver la situation des hérissons dans notre pays, de nous rapprocher du docteur Sophie Lund Rasmussen avec l’intention de collaborer sur ce dossier.
Le docteur Sophie Lund Rasmussen chercheuse en biologie à l’unité sur la conservation de la faune sauvage de l’université d’Oxford conduit des recherches scientifiques sur les hérissons depuis 2011, elle a été invitée, accompagnée de sa collègue le Dr Abigail Gazzard, à préparer le rapport et l’évaluation du statut de l’UICN pour le hérisson européen. Elle a donc joué un rôle majeur dans le changement de statut de conservation du hérisson de « Préoccupation mineure » à « Quasi menacé ».
Sophie Lund Rasmussen est favorable au nourrissage complémentaire des hérissons, tout en insistant sur la solution prioritaire qui est de créer un jardin accueillant pour les hérissons et d’y attirer la biodiversité afin de pouvoir leur offrir une nourriture naturelle. Dans cette situation favorable, l’alimentation complémentaire avec des croquettes pour chats devrait être la deuxième option. Elle comprend aussi que certaines personnes vont hésiter à laisser évoluer leur jardin vers l’état sauvage, et préconise une complémentation alimentaire à base de croquettes pour chats de bonne qualité, tout en invitant les personnes à créer des ouvertures dans leurs clôtures pour faciliter le déplacement des hérissons plutôt que de rester inactif.4
Sophie Lund Rasmussen « mène actuellement un projet visant à étudier le régime alimentaire des hérissons grâce à des analyses d’ADN environnemental d’échantillons fécaux et à des analyses macroscopiques d’estomacs de hérissons (principalement des individus tués sur la route). Cela fournira des informations cruciales à ce sujet, notamment sur la dépendance des hérissons à l’alimentation complémentaire pour leur survie. Si elle trouve de la nourriture pour chats dans tous les échantillons, cela témoignera de l’importance de ce point. »4
La complémentation alimentaire doit être effectuée dans l’hygiène la plus stricte. Au cours de ses recherches, Sophie Lund Rasmussen a constatécomment une population locale entière a été décimée par la propagation de la salmonelle sur un site de nourrissage mal entretenu. C’est pourquoi elle encourage une bonne hygiène : « Les gamelles doivent être soigneusement lavées chaque jour et il faut veiller à se laver et se désinfecter les mains après les avoir manipulées. Il faut également prévoir plusieurs gamelles afin de réduire les interactions agressives entre les hérissons (stress et blessures). Il faut aussi réduire les interactions à proximité et dans les gamelles afin de diminuer le risque de propagation de maladies ». 4
Tout comme nous, par l’intermédiaire d’images de caméras, sur plusieurs de nos sites et de témoignages vidéo d’amoureux des hérissons, Sophie Lund Rasmussen a constaté que le nourrissage complémentaire des hérissons ne les rendait pas dépendants et ne les empêchait nullement de chasser leurs proies naturelles qu’ils préfèrent amplement à la nourriture industrielle.
Sur le sujet de l’alimentation complémentaire, le rapport sur la stratégie de conservation nationale des hérissons en Grande-Bretagne évoque aussi de potentiels impacts négatifs liés à d’éventuelles apparitions de maladies métaboliques en relation avec l’ingestion d’aliments industriels.
Concernant ce dernier sujet d’importance, Sophie Lund Rasmussen « fait de son mieux pour comprendre le régime alimentaire du hérisson. Elle dirige actuellement un projet dans le cadre duquel ils étudient les maladies rénales chez les hérissons, car elle craint un peu que les niveaux de protéines dans les aliments pour chats soient trop élevés pour les hérissons, et que cela puisse peut-être les amener à développer une maladie rénale. »4
Compte tenu de la crise actuelle de la biodiversité, le « risque d’inaction » et la « paralysie par l’analyse » doivent absolument êtres évités3. Aussi, le docteur Sophie Lund Rasmussen et le Collectif Renard Blaireau Nature et Vivant vous recommandent :
- En première intention de réaliser un jardin accueillant pour les hérissons respectueux de la faune et de la biodiversité, si possible en le laissant évoluer « à l’état sauvage », sans utiliser aucun produit chimique, en y confectionnant des ouvertures dans vos clôtures de 12 cm sur 12 cm pour faciliter la circulation des hérissons entre les jardins. Vous pouvez aussi leur laisser un tas de branchages pour qu’ils puissent y installer leur nid ou même leur fabriquer une cabane en bois.
- « L’ensauvagement » du jardin n’est pas toujours une option réalisable, aussi nous vous invitons à apporter une complémentation alimentaire5 et une gamelle d’eau aux hérissons, en respectant ces quelques recommandations indispensables à la sécurité et au bien-être de tous :
- Disperser les sites d’alimentation afin d’éviter les interactions agressives.
- Garder les sites d’alimentation, les gamelles et vos mains dans une hygiène parfaite afin d’éviter la propagation de maladies mortelles.
- Utiliser des croquettes de bonne qualité, de préférence réduite en protéines, afin d’éviter les maladies métaboliques ou les carences.
Téléchargez nos fichiers : «Créer un Jardin accueillant pour les hérissons »
« Compléter l’alimentation naturelle des hérissons »
3Hedgehogs in Britain threat analysis report (avril 2023) https://www.hedgehogstreet.org/conservation-strategy/
4 Entretien avec le Dr docteur Sophie Lund Rasmussen
5 Périodes les plus pertinentes : Après l’hibernation, pendant la saison de reproduction, la période de gestation et de lactation des femelles, et pendant l’automne pour aider les juvéniles désormais indépendants (et aider les mères à prendre du poids pour l’hibernation après avoir pris soin des petits), pendant les périodes de fortes chaleurs et de sécheresses.
Le Dr Sophie Lund Rasmussen a lancé une campagne de collecte de fonds pour l’aider à financer ses recherches scientifiques sur l’alimentation des hérissons, si vous souhaitez l’aider : https://whydonate.com/fundraising/giv-en-pindsvinelort-stet-forskningen-i-pindsvins-fedevalg
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Author: Corinne Rolland
